Sportif assidu depuis tout jeune et grand amateur de trail, Maxime Jourde semble vivre un réel conte de fée. Il allie à la fois passion …Sportif assidu depuis tout jeune et grand amateur de trail, Maxime Jourde semble vivre un réel conte de fée. Il allie à la fois passion et performance au sein de cadres naturels tous aussi splendides les uns que les autres. Retour sur ses expériences personnelles, un régal !

Peux-tu te présenter en quelques phrases pour nos lecteurs.

Je m’appelle Maxime Jourde, j’ai 26 ans. Je suis originaire de Riom. Je suis ingénieur forestier. Je travaille actuellement au Parc naturel région du Haut-Languedoc (à cheval entre le Tarn et l’Hérault) sur des thématiques d’adaptation de la forêt au changement climatique. Je suis passionné de sports de pleine nature et plus particulièrement de trail.

J’ai commencé la course à pied très jeune dans le club d’athlétisme de l’AL Riom. C’est d’ailleurs lors des cross départementaux que j’ai fait la connaissance d’un de mes concurrents qui est devenu par la suite un de mes meilleurs amis et avec lequel je continue de courir aujourd’hui. J’ai ensuite mis la course de côté pour me tourner vers d’autres sports individuels ou collectifs (basket, escalade, VTT, ski). Je suis revenu à la course à pied pour le loisir il y a environ 5 ans. Ma première motivation à l’époque était de trouver un exutoire durant mes années de classes préparatoires. La course à pied était un excellent moyen de relâcher la pression générée par les exigences de cette formation. Depuis 2015, je me suis mis plus sérieusement au trail running. En tant que coureur amateur, la performance et le résultat ne sont pas mes principales motivations. La course à pied est avant tout un plaisir et une passion, que je concilie avec mes autres activités.

Ton métier te permet finalement d’être au cœur de la nature et de pouvoir facilement exercer ta passion.

Plus que mon métier, que j’exerce principalement derrière un ordinateur, je pense que c’est mon cadre de vie qui me permet de pouvoir m’entraîner facilement. J’habite un petit village de l’Hérault proche du massif du Caroux, où les possibilités de sentiers sont infinies pour pouvoir s’entraîner qualitativement. Aussi, les routes sont peu fréquentées et en très bon état, ce qui permet de pratiquer le vélo de route en complément de l’entraînement à pied. Je suis réellement convaincu qu’en terme d’activité de pleine nature, la région a un énorme potentiel.

Peut-on parler d’addiction ? Ce terme est un peu péjoratif surtout dans la pratique du sport

La course à pied est une discipline exigeante qui demande un entraînement sérieux et régulier. Il est donc évident que sa pratique peut engendrer une forme d’addiction. Une addiction est forcément mauvaise puisqu’elle sous-entend une dépendance incontrôlable à un produit ou une habitude néfaste à la santé physique ou psychique. Alors, peut-être pour les non-pratiquants, effectivement, ce sport peut sembler être une addiction, mais je suis en totale désaccord avec cette vision. Je conçois que tenter de repousser ses limites, qu’aller au-delà de la fatigue, des douleurs, permet à l’organisme de sécréter des endorphines qui procurent un plaisir certain. Mais, c’est le cas dans tous les sports. J’admets que lorsque je ne cours pas pendant plusieurs jours du fait de divers empêchements, cela peut avoir un impact négatif sur mon moral. Mais j’ignore la part du besoin physique ou simplement de l’envie de prendre l’air et de sentir mon corps répondre à mes commandes.

Quelles sensations recherches-tu quand tu cours ?

La course à pied et le sport en général sont de très bons exutoires. Après une journée de travail derrière un ordinateur, j’adore sortir prendre l’air, sentir mon corps supporter l’effort que je lui demande et le voir répondre comme je l’entends.

Pour moi les sensations recherchées sont différentes en fonction de la nature de la sortie. Sur les séances de fractionné, on recherche peut-être plus la performance. Essayer d’atteindre notre seuil, le maintenir, l’améliorer.

Sur des sorties plus tranquilles, on ne cherche pas la performance, on cherche uniquement à se vider l’esprit, à profiter du beau temps, du paysage, profiter des gens avec qui on court.

D’autres jours, on va viser la satisfaction d’avoir réussi à atteindre un sommet en un temps minimum.

A mon niveau d’amateur, sur les trails longs, on essaye de se tester, de tester ses limites en quelque sorte sans se mettre en danger : mon corps est-il capable de parcourir cette distance avec ce dénivelé ? Mon entraînement va-t-il porter ses fruits ? Vais-je réussir à gérer ma course, mon alimentation, ma fatigue pendant un effort de plusieurs heures ?   

Tu as pas mal voyagé, comment as-tu réussi a associé ton travail et ton sport ?

Je n’ai encore jamais voyagé dans le but de courir (peut-être que ça viendra un jour). Dans le cadre de mes études, j’ai eu l’opportunité d’étudier ou de travailler dans plusieurs pays comme le Chili, l’Equateur ou la Suisse. A chaque fois, j’ai eu l’occasion de pratiquer mon sport dans des endroits magiques avec toujours autant de coureurs passionnés. Ainsi, j’ai pu tester la pratique du trail au milieu des hauts sommets de la cordillère des Andes, dans la jungle amazonienne ou encore dans les montagnes du canton de Vaud. Des expériences très différentes mais toutes aussi marquantes. La course à pied à l’avantage de pouvoir se pratiquer avec relativement peu de matériel partout où l’accès est possible à pied.    

Ton spot préféré dans les pays que tu as visités

Même si ce n’est pas un pays étranger, je pense qu’un de mes meilleurs souvenirs de trail reste sur l’île de la Réunion. Il est bien connu que la Réunion est un terrain de jeu magique pour les traileurs. Les sentiers sont très bien entretenus, très divers et très techniques. Les paysages sont à couper le souffle. On s’entraîne un jour au bord de l’océan, un autre dans une forêt de cryptomérias et encore un autre au cœur du cirque de Mafate. Trois ambiances très différentes mais à seulement quelques kilomètres l’une de l’autre. Le fait de vivre là-bas pendant plusieurs mois et d’y pratiquer régulièrement la course, m’a aussi permis de découvrir des coins peut-être moins touristiques mais tout aussi splendides.

Un endroit dans le monde où tu aimerais particulièrement aller pour le trail ?

Question difficile. Je ne sais pas si c’est réellement le trail qui me motive à voyager. Evidemment, j’embarque toujours mes affaires de running quand je voyage mais ce n’est pas mon objectif premier. A l’instar de la randonnée, pour moi le trail running est un très bon moyen de profiter des paysages qui nous entourent. La course nous permet de couvrir plus de distance et donc de voir plus de panoramas. En ce sens, si je ne devais citer que quelques exemples, j’aimerais beaucoup retourner en Amérique du Sud pour voir une autre facette de la Cordillère des Andes ou alors j’aimerais aussi aller découvrir les paysages de fjords de Scandinavie. J’espère avoir la chance de retourner un jour à la Réunion pour participer à la Diagonale des fous. C’est l’objectif que je me suis fixé pour mes 30 ans ! Sans vouloir être chauvin, par son nombre et sa diversité de massifs montagneux, la France est un terrain de jeu idéal pour la pratique de ce sport. Et en tant qu’Auvergnat, revenir courir dans la chaine des Puys m’apporte toujours un plaisir tout particulier.  

Tu as aussi participé au Marathon de Paris en 2013. Les entraînements et les préparations sont-ils différents entre le trail et le marathon ?

Avant de basculer sur la course en montagne, j’ai pratiqué pendant quelques années la course sur route. Je courais sans entraînement régulier, principalement pour me vider la tête et retrouver mes amis. Un jour j’ai voulu me lancer le défi de courir un marathon. Pour moi c’était réellement la distance olympique réservée aux coureurs expérimentés, mais qui, avec un bon entraînement, était accessible. Mes premiers plans d’entraînement datent de cette époque. J’ai alors eu la chance et le privilège d’être coaché pendant quelques semaines par Jean-Pierre Monciaux. Avec le recul et le passage au trail, j’ai pu faire la comparaison entre un entraînement pour une course sur route et une course en montagne. Il est évident que les séances d’entraînement vont différer entre une préparation pour une course sur route sans dénivelé (où le chrono est le principal objectif) et une course en montagne avec plusieurs milliers de mètres de dénivelés positifs (où passer la ligne d’arrivée est le principal objectif pour la plupart des traileurs amateurs). Par conséquent, en résumant grossièrement, même si les séances de fractionné et de puissance vont être communes aux deux pratiques, l’entraînement en trail va s’orienter davantage vers l’enchaînement de sorties longues avec du dénivelé.   

Question un peu plus sociale : nous avons des idées bien arrêtées de ces sports un peu à l’image de notre société, **c’est-à-dire individualiste. Est-ce réellement le cas ?**

La course à pied reste un sport individuel. Nous sommes très souvent les seuls maîtres de notre réussite ou non à une épreuve. Mais je ne vois pas la course à pied comme une activité individualiste. Au contraire, on pourrait citer de très nombreuses situations où la course se pratique à plusieurs. Il n’y a qu’à observer le nombre croissant de clubs de trail ou d’athlétisme. Ces personnes cherchent à se regrouper pour apprendre des plus expérimentés ou tout simplement car courir à plusieurs est beaucoup plus stimulant. Aussi, dans les épreuves de longue ou très longue distance, on constate que les traileurs de même allure se regroupent pour se soutenir mutuellement pendant les périodes de « moins bien ».

Pour mon expérience personnelle, le trail est aussi un moyen de garder contact avec des amis de longue date. Plusieurs fois par an, on se retrouve pour réaliser des projets sportifs. Sans eux, sans avoir la possibilité de le partager, je ne me lancerais jamais dans de tels projets.  

Les médias s’intéressent de plus en plus aux trails appelés « trail ultra longue distance » qu’ont-ils de plus attrayants que les trails courte ou moyenne distance ?

De mon point de vue, les trails ultra longue distance sont des épreuves encore différentes des courses courte ou moyenne distance. Pour des coureurs lambda, les trails ultra longs sont des courses qui se terminent en plusieurs jours. Cela implique une gestion de l’effort totalement différente : alimentation particulière au cours de l’épreuve, gestion du sommeil, gestion de la fatigue, adaptation de la foulée pour avoir une course économe en énergie…etc.

Il y a encore quelques années, les courses d’ultra longue distance comme la Diagonale des fous ou l’UTMB, pour citer les plus connues, étaient des épreuves réservées à des coureurs élites. A mes yeux, les « fous » qui se lançaient dans ce type d’épreuve étaient des champions entraînés et très bien préparés. Depuis quelques années maintenant, le trail s’est fortement popularisé et ces épreuves « élitistes » ont ouvert leurs portes à un grand éventail de coureurs, en élargissant notamment leurs barrières horaires pouvant mettre les concurrents hors course. Selon moi, la grande majorité des traileurs essaie perpétuellement de tester ses limites et de voir jusqu’à quelle distance le corps va résister. Si je peux courir un 10km alors je peux sûrement courir un 20km. Si je peux courir un 20km, alors je peux très certainement courir un 35km. Et cela jusqu’à se lancer le défi de réussir à boucler un parcours de 170km avec 10 000 mètres de dénivelés positif.  C’est à mon avis ce qui explique le grand engouement pour les trails d’ultra longue distance et donc l’intérêt porté par les médias sur cette discipline.

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Tes projets pour la saison à venir ?

Mes projets dans le domaine du trail pour la saison 2019 sont de deux types.

Tout d’abord, poursuivre mon entraînement pour pouvoir continuer à prendre du plaisir à courir et  pouvoir participer à des courses tout au long de la saison sans me blesser. Le mois d’octobre est le moment où on commence avec mes amis à planifier notre saison prochaine. Autant sur les périodes d’entraînement, je suis assez solitaire, autant sur les sorties longues ou sur les courses j’apprécie davantage de retrouver mes amis. C’est une façon de me motiver, de partager mes aventures et tout simplement de se réunir pour passer du temps ensemble en montagne.

Aussi, cette année Antoine Guillon et son équipe m’ont proposé de rejoindre l’organisation du Grand Raid 6666. C’est donc avec grand plaisir que j’ai pris part à cette aventure dans le massif du Caroux dans l’Hérault. En 2017, j’ai déjà participé à une des courses proposées. Ce sont des courses très techniques, mais réellement magnifiques. L’évènement aura lieu les 7-8-9 juin 2019, c’est donc une très bonne préparation pour les trails de la fin de l’été ou de la fin de saison. Cette expérience me permet de voir le revers de la médaille et de m’investir à mon tour dans la logistique pour que d’autres coureurs prennent plaisir à venir découvrir notre territoire.

Un petit mot pour donner envie aux gens de suivre ta passion.

Depuis ces dernières années, la course à pied sur route ou hors stade a considérablement augmenté son nombre d’adeptes. Pour moi, son succès s’explique par différents facteurs : par les bienfaits physiques et psychologiques qu’elle permet de développer.

Egalement par sa facilité d’accès, peu de matériel est nécessaire pour débuter la course à pied (des investissements plus importants sont néanmoins nécessaires quand on en fait une pratique plus régulière). Mais même pour débuter, je conseille aux futurs coureurs d’être attentifs au choix de leurs matériels pour éviter tous les effets délétères de la course à pied.

Par son coté social, il est très agréable de se retrouver à plusieurs pour partager un simple moment de footing, se motiver mutuellement pendant une séance plus soutenue ou encore lors d’un ultra trail, se soutenir afin de réussir à franchir la ligne d’arrivée.

Personnellement dans le trail running, je retrouve en plus la notion de défi personnel. Il est toujours gratifiant de réussir à atteindre un objectif, qui semble initialement impossible, grâce à un entraînement soutenu.

Enfin, le trail permet de découvrir de nouveaux paysages, de nouvelles montagnes, de nouvelles forêts et de s’évader dans cet environnement.

Pour conclure, j’apporterai uniquement une petite mise en garde. Dans tous les sports et en particulier en course à pied, il est primordial d’écouter son corps et ne pas chercher à brûler les étapes. Avec un entraînement régulier, les progrès apparaissent très rapidement et la sensation de pouvoir toujours faire plus est facilement ressentie. Cependant, il est important d’augmenter progressivement le nombre de séances d’entraînement, la fréquence des compétitions ou encore l’augmentation de distance et/ou de dénivelé. Le risque de blessure n’est pas à négliger pour un sport aussi exigeant que la course en montagne.

Crédit photo : Maxime Jourde