Louis Tosoni, jeune Auvergnat de 24 ans est un habitué des terrains de rugby depuis plus de dix ans. Grâce à ses études il a même pu le …Louis Tosoni, jeune Auvergnat de 24 ans est un habitué des terrains de rugby depuis plus de dix ans. Grâce à ses études il a même pu le pratiquer à l’étranger ! Et plus particulièrement au Costa Rica, où une seule expression régie le style de vie des Costaricains, Pura Vida.

Salut Louis ! Tu peux te présenter ?

Je suis étudiant en Management des Achats Internationaux originaire de Cébazat exactement. J’ai étudié pendant trois ans à Clermont jusqu’à ce que mes études me poussent à partir à l’étranger afin de découvrir d’autres cultures. J’ai pu partir avec un pote, Simon Mercier, au Costa Rica pendant huit mois. C’était une expérience de vie incroyable où j’ai pu découvrir la « Pura Vida ».

Tu fais du rugby depuis tout jeune c’est ça ?

Exactement, j’ai commencé au collège où pas mal de mes camarades jouaient au CAS Gerzat et m’ont initié au rugby. J’ai donc été formé dans ce club où j’ai beaucoup appris, à vrai dire j’étais vraiment une pompe à vélo à l’époque. Mais grâce à certains éducateurs j’ai pu m’améliorer, et à 18 ans j’ai pris une licence au Blanzat AC afin de pouvoir jouer en Belascain avec l’entente de l’ACR et du CUC où j’ai continué d’apprendre le rugby à un niveau assez intéressant en jouant contre des équipes comme Nevers, Chambéry, La Voulte-Valence… C’était très formateur, mais c’est là que j’ai commencé à me blesser, et je partais au Costa Rica à peine remis d’un arrachement osseux. Je me suis donc posé pas mal de questions avant de contacter les responsables de l’Universitarios Club de Rugby dans la capitale. Quelques mois avant j’avais pu partir à Madagascar grâce à l’association Terres en Mêlées, une association qui utilise le rugby comme outil de développement social dans divers pays d’Afrique. C’était aussi une expérience magnifique liée au rugby.

Pourquoi le Costa Rica ?

Au moment de partir à l’étranger il fallait choisir une école, la seule condition étant d’avoir une certification pour s’ouvrir le plus de portes possibles. J’ai tout fait pour avoir une destination exotique, et les plus exotiques étaient le Costa Rica ou la Finlande. Et ce n’est pas que les températures négatives ce n’est pas mon truc, mais autant partir visiter les plus belles plages au monde et les parcs naturels sous les tropiques. Les études étaient aussi importantes dans le choix, et de pouvoir intégrer l’une des écoles les plus reconnues d’Amérique latine a été une très grande opportunité que j’ai saisie.

Ce n’est pas vraiment une terre de rugby si ?

Pas du tout ! J’ai regardé avant le départ si je pouvais jouer là-bas, et j’ai trouvé le site de la fédération où toutes les équipes présentées. C’était cinq équipes à XV qui regroupaient tous les joueurs du pays, et un groupe qui formait l’équipe nationale. Ils s’entraînent ensemble les jours où ils n’ont pas leur club afin d’améliorer le niveau technique. C’est un sport en développement là-bas et la culture rugby est clairement influencée par l’Argentine et les nations du Sud. Ça donne un rugby très rapide avec des joueurs physiques, mais leur technique est encore très faible. Il y a un écart important entre les meilleurs joueurs qui pourraient jouer en fédérale et qui se donnent à fond pour le développement de leur sport et les novices. On voit que le rugby féminin est en développement, et notre club avait aussi une équipe qui jouait à VII. Elles étaient incroyables dans leur implication, et elles faisaient tout pour initier de nouvelles joueuses à leur passion.

Qu’as-tu appris là-bas ?

Ce sport au Costa Rica demande beaucoup d’implication des équipes, il n’y a pas d’équipes dirigeantes comme on en a en France, et donc personne pour gérer les déplacements, l’organisation des matchs, le nettoyage des maillots … Donc j’ai redécouvert le dévouement pour un maillot et pour un sport. Les gars là bas se lèvent le dimanche matin pour aller préparer le terrain, analysent eux-mêmes les vidéos, organisent les préparations physiques et le refont chaque saison avec la même envie. Sur le plan sportif j’ai pu travailler mon cardio pour préparer des tournois à VII, ce que je n’avais jamais fait avant. Mais ils m’ont aussi fait jouer à tous les postes derrière ce qui était osé mais intéressant.

VII CR Clermont Sport

Tu as pu leur transmettre des compétences ? Une vision différente ?

Les seules compétences que j’ai pu leur transmettre sont celles que j’avais pu apprendre avec les belascains en France pour les touches et les mêlées. Il y a un gros manque technique là-bas et les positionnements étaient améliorables. Dans le combat aussi il y avait du travail, et plusieurs fois j’ai essayé de prendre la parole aux mi-temps avec mon Espagnol (plus qu’hésitant) pour essayer de motiver les gars. Ils n’avaient pas cette hargne qu’on peut avoir en France, souvent les gros étaient un peu mous et se jetaient pas sur les ballons ou n’allaient pas chercher les porteurs de ballons. J’ai aussi essayé de donner confiance aux jeunes qui commençaient qui avaient besoin d’être encouragés. C’était vraiment un échange incroyable, et ce sont des personnes qui sont très ouverts envers les étrangers. On leur a aussi fait découvrir le « ventre et glisse » lors d’un entraînement particulièrement humide, et les gars ont continué à le faire après notre départ.

Les entraînements sont-ils les mêmes ?

Alors pas du tout, les effectifs étant beaucoup moins importants, ils évitent à tout prix le contact. Ils préfèrent le touché pour permettre aux joueurs de travailler l’évitement, et les petits exercices pour travailler le plaquage ou les zones de rucks. Chaque entraînement finissait par un verre dans un bar tous ensemble pour pouvoir discuter et passer du temps ensemble. Les préparations aussi sont plus importantes, et la plupart des joueurs font du cross-fit ou d’autres exercices à côté. Et au-delà de ces préparations, les joueurs faisant parti de l’effectif de l’équipe nationale ont accès à des infrastructures et des séances d’entraînement plus développés. Souvent les hommes et les femmes s’entraînaient ensemble, et certaines s’entraînaient plus que nous à la course et la salle.

Il fait très lourd dans ces pays-là, ça pèse sur les organismes non ?

C’est l’une des choses les plus marquantes, c’est un pays tropical donc très chaud où on transpire très vite, d’où l’importance d’avoir un bon cardio. Il y a deux saisons principales, une très humide et l’autre très sèche. Les terrains souffrent donc beaucoup, et les organismes aussi. En saison sèche il y a beaucoup de problèmes de fractures ou d’entorses à cause de la raideur du terrain. Je pense que je n’ai pas joué une seule fois les 80 minutes, je finissais toujours capot ouvert ou je sortais dix minutes le temps de souffler. Mais les gars là-bas sont habitués et on ne jouait pas aux heures les plus chaudes, donc il n’y avait même pas de water break…

Tu jouais avec des gars qui avaient un certain niveau il me semble…

Il y a un joueur qui m’a marqué, c’était le capitaine de notre équipe et de l’équipe nationale qui joue maintenant dans le Sud-Ouest en France. Andy, c’est un mec incroyable qui a découvert le rugby assez vieux, mais qui a tout sacrifié pour venir jouer en France et décrocher un bouclier ici. Il passait son temps à tout travailler pour être le meilleur joueur du pays, et il avait pour but de faire jouer les autres. D’autres joueurs avaient un très bon niveau, et les matchs contre l’équipe nationale où nos potes jouaient étaient des moments très enrichissants. Ils ont d’ailleurs pu participer aux JO d’Amérique Latine cette année à VII et ils suivent donc des entraînements spécifiques car ce sont les mêmes joueurs à XV qu’à VII. Ce que j’en retiens c’est qu’au-delà des capacités naturelles, c’est le travail et l’abnégation qui payent encore là-bas.

La troisi**ème mi-temps est aussi une coutume locale ?**

Comme chez nous, sauf qu’on oublie les grands plateaux de charcuterie et le fromage mais on garde les principaux : la bière et la bonne humeur. Servies avec des shooters de Chiliguaro (du cacique, du piment et du jus de tomate), les bières locales nous ont permis de passer des bonnes fins d’après-midi et apprendre à connaître tous les joueurs du pays. Ils sont 150 joueurs réguliers à se croiser tous les week-ends donc forcément tout le monde connaît tout le monde et on a plaisir à retrouver les adversaires pour faire la fête et échanger. Mêmes les arbitres qui sont aussi des joueurs, ou des anciens joueurs, viennent toujours faire la fête.

Ton plus beau souvenir sur un terrain Costaricain ?

Il y en a forcément plusieurs, en un an on garde beaucoup de souvenirs ! Au-delà des victoires à la dernière minute ou des premiers matchs de débutant qu’on avait accompagné (dont mon colocataire Simon qui a réussi un 100% au pied pour son premier match), je vais retenir longtemps les Rainforest Seven. C’est un tournoi international de rugby à VII avec des équipes nationales d’Amérique Centrale, et une des plus grandes universités américaines de rugby. J’avais été contacté pour intégrer une équipe Barbarians avec d’autres étrangers et des locaux non sélectionnés. Et c’est avec cette équipe qu’on a fini deuxièmes en battant l’équipe du Costa Rica. C’est un souvenir incroyable car ils m’avaient fait jouer en 5 (Position de 10 à VII) et je marque l’essai de la victoire après une feinte de passe et une course dans leur moitié de terrain suivi par ma caravane.

Tu y retourneras pour revoir les copains du Rugby ?

Si j’ai l’occasion j’y retournerai avec plaisir, et souvent je me dis qu’ils me manquent. Mais j’ai régulièrement des nouvelles et Andy est venu jouer en France. Les autres viennent visiter l’Europe chacun leur tour, donc on a des occasions comme ça de se revoir. Et on se voit souvent aussi avec deux français avec qui nous sommes devenus très amis et qu’on voit plusieurs fois par an.

Qu’est-ce que tu peux leur souhaiter ?

Je peux juste leur souhaiter d’avoir plus de soutien localement car le rugby aurait un fort potentiel pour transmettre des valeurs dans un pays où il y a beaucoup de jeunes désœuvrés ce qui génère de la violence. Les personnes qui gèrent chaque club ont besoin de soutien, et les structures doivent être mises en place.

Les grands clubs européens devraient aussi s’intéresser à eux, car dans ces pays il y a du potentiel. Ce ne sont pas des Fidjiens mais avec du travail, certains pourraient atteindre un très bon niveau.

Crédit photo : Louis Tosoni + Federacion de Rugby de Costa Rica